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FRANCOIS-XAVIER ET SA DESCENDANCE

FRANCOIS-XAVIER ET SA DESCENDANCE

Par Guy PEIROTES, petit-fils de François-Xavier Schaeffer, Version du 18 avril 2011  MAJ le 27 avril 2012

François-Xavier, le petit dernier de la famille Michel Schaeffer /Marie Victorine Baumann, né le 14 janvier 1878, perdit sa mère à l’âge de trois ans et fut surtout élevé par sa tante Marie Amélie Schaeffer, appelée par toute la famille Tante Lehnel.

Il épousa le 25 novembre 1903 Emilie Schutz née le 5 novembre 1883, fille d’ Aloyse Schutz et de Marie Joséphine Bornert. Aloyse Schutz, cultivateur, fut maire de Reichstett de 1896 à 1919.

             

       Le mariage de François-Xavier Schaeffer et d’Emilie Schutz

          

 Aloyse Schutz entouré de son épouse Joséphine Bornert et (de gauche à droite) Eugénie, Aloyse et Marie

Outre leur activité de cultivateurs, François-Xavier et Emilie tenaient l’Auberge/ Epicerie « Zum Stern » (A l’Etoile), 118 rue Oberrend, venant de la famille Baumann. Du reste, c’est dans cette auberge que mon père Marcel Peirotes, alors jeune instituteur à Reichstett, prenait ses repas et fit ainsi connaissance de la plus jeune des filles de la famille, lui fit la cour et l’épousa. Après la guerre, en 1946, l’agence postale est installée dans un local attenant à l’auberge et y resta jusqu’en 1951.

En fait François-Xavier était surtout intéressé par les chevaux et par les courses. Je me rappelle, dans mon enfance, le sulky avec lequel il faisait de nombreuses courses et qui était, au repos, adossé au mur de façade de la grange, les brancards dressés à la verticale ; je me rappelle également les étalons noirs qu’il affectionnait. Ses filles n’étaient pas en reste dans l’amour des chevaux. La photo ci-dessous montre Victorine et Alice en action sur le sulky familial.

             

                                     Victorine et Alice Schaeffer

François-Xavier dut faire 2 années de service militaire dans l’armée allemande, sans doute de 1898 à 1900. Il dut ensuite faire la guerre de 14/18 du coté allemand, alors que son frère Théodore était sans doute en face dans l’armée française. On le voit sur une photo de la collection familiale en tenue de soldat, portant devant lui un sabre.  Nous manquons pour l’instant de renseignements sur cette période. La photo de famille ci-dessous, prise avec son épouse et ses enfants, sans doute vers 1917, le montre dans l’uniforme allemand dans lequel il n’a pas l’air particulièrement heureux.  En fait, cette guerre fut terrible pour lui comme pour les autres soldats. En tant qu’Alsacien il fut envoyé sur le front oriental et combattit longtemps en Roumanie. Il eut la chance de revenir vivant de ce conflit mais fut traumatisé par ces épreuves. Il rentra dans son foyer malade des sinus et mit des années à en récupérer. Il resta marqué à vie par cette guerre et son visage, complètement éteint, de la photo ci-dessous montre les souffrances par lesquelles il dut passer. Quant à sa femme, ma grand-mère Emilie, elle dut élever seule les cinq enfants dont la plus petite, Germaine, ma mère.

 

 

Je n’ai pas de lettre provenant des archives familiales de mon grand-père écrites à sa famille pendant cette guerre. A défaut je vais en citer trois, sélectionnées parmi des centaines dans le livre « Paroles de Poilus. Lettres et carnets du front 1914-1918» chez Librio 1998.

 1er juillet 1915 Lettre de Emile Sautour

« On est arrivé à se battre dans les tranchées non avec le fusil et la baïonnette, mais les outils portatifs : la pelle et la pioche jusqu’au couteau.

Je vous prie donc de m’adresser dans le plus court délai un couteau solide, puissant, avec un cran d’arrêt, ainsi qu’une chaîne pour l’attacher »

 26 avril 1918 Lettre de Arthur Mihalovici

« Des copains sans nombre ont été écrabousés, mis en miette, un vrai désastre, gradés, hommes, ça tombait comme les semences »

 31 juillet  Lettre de Pierre Rullier

« Les tranchées de première ligne sont en face de nous [….] ici, en plus des balles, des bombes et des obus, on a la perspective de sauter à 100 mètres en l’air d’un instant à l’autre ; c’est la guerre des mines. [….] la dernière explosion a fait un trou de 25 mètres de profondeur sur 50 mètres de diamètre. Inutile de te dire ce que sont devenus ceux qui se trouvaient dans le rayon. »

 

                  

                           La famille François-Xavier Schaeffer

On voit sur cette photo la famille au grand complet avec ses 5 enfants :

Lucien, né le 10 juillet 1904

Marie née le 17 février 1906

Victorine née le 10 septembre 1907

Alice née le 15 juin 1910

Germaine née en 1914, sur les genoux de son père.

François-Xavier devait mourir le 30 juin 1952 et Emilie le 21 septembre 1962.

Lucien créa une famille très jeune en épousant Hélène Thériat et reprit l’exploitation agricole de sa belle famille, la ferme Carolus à Vignory en Haute-Marne. De cette union naquirent 4 enfants :

André en 1924

Paulette en  1926

Jean le en 1929

Jeanne en 1930.

       

Marie, sans doute très peu intéressée par le travail dans les champs, partit très jeune travailler comme vendeuse à Paris où elle rejoignit son oncle Théodore. Ne manquant ni d’audace, ni de panache, elle répondit en 1923 à une petite annonce qui recherchait une dame de compagnie expérimentée pour l’Infante d’Espagne Eulalie (sœur d’Alfons XII roi d’Espagne, née à Madrid en 1864, décédée à Irun en 1958). En prétendant être plus âgée qu’elle n’était en réalité (elle n’avait que 17 ans !) elle plut à l’Infante et fut engagée. Elle séjourna deux semaines à Arcachon Villa « Sans Souci » puis dans le 16ème arrondissement chez elle, avant de l’accompagner  pour divers longs voyages à Madrid, puis la Suisse, l’Allemagne, Séville, Grenade, Malaga, Cadix, Gibraltar, le Portugal, l’Amérique du Sud, etc. En fait elle voyagea sans discontinuer, en accompagnement de l’Infante, de novembre 1923 à 1926.

Je ne peux résister à joindre la copie de son agenda pendant le début de cette période (jusqu’au 15 juillet 1924), agenda de jeune fille que j’ai trouvé dans les affaires personnelles de ma mère où il se trouvait je ne sais comment.   

 

                                           

        

   

                        

Pour une jeune fille venant de la campagne,  être au service de l’Infante d’Espagne était totalement inespéré et représenta une  chance fabuleuse pour Marie qui sut mettre à profit tout ce qu’elle avait appris au contact d’une altesse royale. En 1926 après avoir voyagé un peu partout, elle proposa à Son Altesse de partir pour quelque temps aux  Etats-Unis. Celle-ci ne voulut pas partir aussi loin et proposa à Marie d’y aller  pour accompagner un couple d’amis dont elle pourrait, entre autre, s’occuper des sept chiens et les promener. Marie accepta l’offre et passa donc une partie de son temps de la traversée à promener les sept « toutous » sur les ponts pour leur faire prendre l’air marin. Que fit-elle exactement aux Etats-Unis au service de ce couple, à part s’occuper des chiens, je ne le sais pas exactement…. Elle retourna en France en 1928 et revint s’installer à Strasbourg où elle fut embauchée comme caissière chez Singer (machines à coudre).

Il faut préciser que  l'Infante se lia d'une véritable amitié avec Marie, qu'elle vint à Reichstett pour connaître la famille Schaeffer et en particulier  ses sœurs. Elle ne donna son accord pour laisser partir Marie aux Etats-Unis qu'à la condition que sa sœur Victorine la remplace auprès d'elle. Cette dernière ne se fit pas prier et resta au service de l'Infante de 1926 à 1928 avant de se marier en 1929. Pour la petite histoire, quand elle parla de se marier, l'Infante demanda que la sœur suivante, Alice, prenne la relève, ce que cette dernière fit avec plaisir jusqu'à fin 1929 juste avant de se marier.

A Strasbourg Marie fit la connaissance de deux frères de la famille Benjamin. Cette famille juive allemande  de 6 ou 7 enfants vivait à Francfort sur Oder dont elle était l'une des familles les plus riches, exerçant la profession de diamantaires. Bien informés  de ce qui se passait en Allemagne et sentant venir de lourdes menaces sur les familles juives, les membres de la famille parvinrent à quitter l'Allemagne sans doute en 1931 ou 1932, avant qu'Hitler ne prenne le pouvoir comme  Chancelier en 1933 et surtout avant la promulgation en  1935 des Lois de Nuremberg contre les juifs.  La famille se dispersa dans plusieurs pays d'Europe. Otto, le plus jeune, et Julius, un de ses  frères, s'établirent à Strasbourg avec leur gouvernante polonaise, Marqueta. Marie fit la connaissance des deux frères et en particulier d'Otto qui, bien que son aîné de 22 ans, lui fit une cour assidue. Il semble qu'ils aient alors quitté Strasbourg pour s'installer à Paris.

Après la défaite de 1940, l'envahissement de la France par les troupes d'occupation et  l'installation  de la Wehrmacht à  Paris le 14 juin 1940, l'armée française se replie sur la Loire, le gouvernement quitte Tours pour Bordeaux et en quelques jours  la ville se vide de 2/3  de sa population. C'est l'Exode. Le 22 juin l'armistice est signé à Rethondes et la France est coupée en deux, avec la zone libre au sud de la Loire.

On peut supposer que Otto, Marie, Julius et Marqueta fuirent Paris en catastrophe à ce moment-là, ou un peu avant, pour se réfugier en zone libre. Ils quittèrent  précipitamment leur appartement  en y laissant tout leur mobilier, dont  (c'est ce qui se dit dans la famille) un tableau de Renoir. On trouve leur trace à Limoges où Marie et Otto  se marièrent le 29 juin 1940.

Limoges, suite à l'Exode,  hébergea une importante communauté juive  bien organisée sous la  présidence d'Henry Bloch et soutenue  par le Grand Rabbin Abraham Deutsch. Toutefois les exactions contre les juifs  devinrent de plus en plus fréquentes et le  « statut des juifs » du régime de Vichy alla bien plus loin que l'ordonnance allemande. Un premier « Statut des juifs » est institué le 3 octobre 1940, excluant les juifs des fonctions publiques ; la loi du 4 octobre 1940 est promulguée, prévoyant l'internement des Juifs étrangers dans des camps. Le 2 juin 1941 un second statut est institué  et le 16 juillet 1942, Vichy participe très activement aux rafles du  Vel d'hiv  où 76 000 juifs sont déportés. Enfin, le 11 novembre 1942, la zone libre est envahie par les Allemands et de ce fait la situation devient de plus en plus critique pour les juifs.

Devant toutes ces menaces Otto, Julius, Marqueta et Marie. Otto et Marie  firent des plans pour quitter la France et s'installer en Amérique. Ils quittèrent  Limoges pour  Lyon où, dans un restaurant,  ils rencontrèrent Guy Brun  dont ils  avaient fait la connaissance  plusieurs années auparavant à Francfort sur Oder où il était consul de France. Guy Brun venait d'être nommé par le gouvernement de Pétain Consul au Guatemala, pays où il devait partir avec Lydie Schaeffer sa compagne. Portant le même patronyme que Lydie, Marie pût se faire passer pour membre de sa famille et tous les 6, Guy et Lydie Brun, Julius et la gouvernante ainsi que  Marie et Otto purent quitter la France pour embarquer à destination du Guatemala. En chemin, les 4 « Benjamin » s'arrêtèrent à New York, Guy Brun et Lydie continuèrent le voyage pour la prise de fonction au Guatemala.

Otto et Marie  s'installèrent à New-York, 241 Central Park West, adresse prestigieuse. Arlette Kuhn, qui était la filleule de Marie, vécut chez eux de septembre 1949 à avril 1950.  Otto et Marie  n'eurent pas d'enfants mais se comportèrent avec les membres de la famille comme s'ils avaient été leurs enfants en les gâtant tous.  A cet égard, je me rappelle avec émotion tous les colis que nous recevions des Etats-Unis  pendant et  après la guerre remplis de vêtements, de nourritures, de disques et de gâteries diverses. Les cadeaux de Tante Marie du Nouveau Monde à sa famille du vieux monde, ravagé par la guerre et la pénurie ! Quand Otto mourut à New York, Tante Marie quitta le « 241 Central Park West » et   revint au bercail, fit construire une maison à Reichstett et s'y installa. Elle continua à gérer au mieux ce qui restait de sa fortune américaine, pour en faire bénéficier sa famille à son décès. Elle mourut à Reichstett le 3 juillet 1976.

 

 

            

            Tante Marie

 

 

 Victorine prit la relève auprès de l’Infante quand Marie la quitta pour se marier. Elle resta à son service plusieurs années avant de se marier elle-même en 1927 ? avec Emile Kuhn. Ils eurent une seule fille Arlette née le 29 avril 1930. Ils tenaient la boucherie- charcuterie de Reichstett.

Alice enfin prit la relève de Victorine au service de l’Infante et l’accompagna jusqu’à son propre mariage en 1929 ? avec Victor Bornert. Ils furent les seuls de la famille à maintenir la tradition familiale agricole. De leur union naquirent :

Jean-Paul en 1930

Hélène lenr 1934

Madeleine

Alice.

Germaine, je ne sais pour quelle raison, n’eut pas la chance de ses sœurs et ne travailla pas au service de l’Infante. Elle épousa Marcel Peirotes, le nouvel instituteur de Reichstett. De leur union naquirent :

Yves en 1940

Guy en 1943.